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EDITO

« Pour rien »

De même que les années, les traditions savent quitter leurs vieilles peaux et se renouveler. Elles, qui tournent leurs roues sur les routes du monde depuis si longtemps, connaissent les cahots du chemin et les transformations ! Ce sont leurs couches superficielles que l’on déteste et veut détruire, celles qui sont lourdes des poids et erreurs de nos ancêtres. Mais le cœur d’une tradition est toujours clair… C’est de là qu’il faut repartir. Mais comment l’atteindre ?

Une bonne manière de cheminer vers le cœur d’une tradition consiste à l’aborder « pour rien ». C’est-à-dire sans intention ni projet, sans volonté de produire ou créer quoi que ce soit, ni pour les autres, ni pour soi. Ce n’est pas si facile !

Si on trouve ce dépouillement, cette qualité – qui est aussi celle du candide, du débutant, de l’innocent découvreur - on entre alors dans la matière d’une tradition comme on se promène en forêt. Cette manière nous guide et renouvelle notre regard, de même que lorsqu’on traverse la forêt, n’étant pas pressé et allant sans but, on voit soudain une trace d’animal sur le sol, un discret nid d’oiseau à demi masqué par les feuilles, une fleurette rose en forme de cœur...

Ainsi, allant sans but, en silence, en ouverture, on peut dire qu’on chemine « sans commentaire ». Cette manière là nous permet d’entrer dans une couche bien plus profonde. C’est comme si la forêt elle-même, attirant notre regard de curiosité en émerveillement, nous guidait vers une clairière lumineuse et secrète... Les sens des symboles éclatent et s’épanouissent sous nos yeux, nous « parlent » et nous mènent toujours plus loin. Tout s’ouvre pour nous.

Malgré cette magie, il nous faut rester concentré pour maintenir cette qualité vide du « pour rien », qui seule peut nous mener vers le trésor ; c’est la difficulté. Foutre la paix aux symboles. Les recevoir, les aimer, les laisser nous émouvoir, nous éclairer, mais ne pas vouloir les récupérer. Sinon tout s’arrête à l’instant même et la tradition redevient petite et étriquée…

C’est comme cheminer vers quelque chose de très précieux, humble et pur comme un Graal non visité…

Catherine Zarcate